Voler en agglomération en catégorie ouverte : la France est-elle vraiment plus restrictive que ses voisins européens ?
- Frédéric Aroco
- 6 nov.
- 4 min de lecture

Depuis la mise en place du règlement européen sur les drones (UE 2019/947 et 2019/945), l’Union européenne a harmonisé les grands principes d’exploitation des drones civils. En théorie, un pilote peut voler dans les mêmes conditions à Madrid, Berlin ou Marseille. En pratique, les différences entre pays restent fortes, notamment pour les vols en zone urbaine dans la catégorie ouverte.
Catégorie ouverte : un cadre européen commun
La catégorie ouverte (Open Category) vise les opérations à faible risque, sans autorisation préalable, tant que certaines conditions sont respectées :
maintien du drone en vue directe (VLOS) ;
respect de la hauteur maximale de 120 m ;
utilisation d’un drone marqué CE (C0 à C4) ;
respect des distances envers les personnes selon la sous-catégorie (A1, A2 ou A3).
Rien, dans le texte européen, n’interdit formellement de voler en agglomération en catégorie ouverte. Toutefois, le règlement laisse aux États membres la possibilité de créer leurs propres zones géographiques UAS (UAS Geographical Zones) pour restreindre ou interdire certaines zones de vol, notamment pour des raisons de sûreté, de protection de la vie privée ou de défense nationale.
La position française : une interdiction claire en zones peuplées
La France a fait le choix de la clarté. Selon la DGAC, les vols en catégorie ouverte sont interdits en agglomération. Seules les opérations en catégorie spécifique (STS-01, STS-02 ou scénarios nationaux adaptés) peuvent être autorisées, sous réserve de respecter un MANEX et une déclaration d’exploitant UAS.
Cette position découle d’un principe de sûreté publique : dans un pays dense et très sensible aux questions de sécurité, il est jugé préférable d’encadrer les vols en milieu urbain par un dispositif contrôlé. Ce choix prolonge la philosophie de l’ancien scénario S3 (vols en agglomération sous autorisation).
Et les autres pays européens ?
Contrairement à une idée reçue, la France n’est pas la seule à limiter les vols de drones en ville. Voici un aperçu des cartes UAS officielles et des restrictions urbaines dans plusieurs pays européens :
Pays | Carte officielle | Restrictions principales en zone urbaine |
🇫🇷 France | Géoportail UAS (DGAC) | Interdiction explicite de vol en agglomération en catégorie ouverte. |
🇩🇪 Allemagne | DIPUL (Luftfahrt-Bundesamt) | Nombreuses zones urbaines classées interdites ou soumises à autorisation régionale. |
🇪🇸 Espagne | ENAIRE Drones (AESA) | Zones CTR et héliports très étendus : vol urbain rare sans coordination préalable. |
🇮🇹 Italie | D-Flight (ENAC) | Grands centres urbains en rouge ou jaune : autorisation nécessaire dans la plupart des cas. |
🇧🇪 Belgique | Droneguide (Skeyes) | Environnements urbains couverts par CTR et infrastructures critiques. |
🇳🇱 Pays-Bas | GoDrone (LVNL) | Très forte densité de zones contrôlées autour des villes, autorisation requise. |
🇩🇰 Danemark | Dronezoner (Trafikstyrelsen) | Règles strictes de distance vis-à-vis des habitations, peu de zones urbaines ouvertes. |
🇸🇪 Suède | LFV Dronechart | Zones urbaines classées “restreintes” près des aéroports et héliports. |
🇦🇹 Autriche | Austro Control DroneSpace | Autorisation obligatoire pour la majorité des vols en zones habitées. |
🇨🇭 Suisse (hors UE) | OFAC Drone Map | Villes et infrastructures sensibles interdites ou réglementées. |
En résumé :
Même si d’autres pays affichent officiellement une “autorisation” de voler en catégorie ouverte, leurs cartes UAS rendent ces vols quasi impossibles dans les faits, en raison des multiples zones restreintes, CTR, héliports, ou périmètres de protection.
Pourquoi cette disparité ?
Le règlement européen a voulu harmoniser, mais il reconnaît explicitement la souveraineté nationale sur l’espace aérien. Chaque État reste libre de déterminer le niveau de précaution jugé nécessaire. Ainsi :
la France privilégie la lisibilité et la prévention maximale ;
l’Allemagne et l’Italie multiplient les zones locales d’interdiction ;
d’autres pays laissent une apparente liberté, mais l’exécution reste très encadrée sur le terrain.
Conséquences pour les exploitants français
Les exploitants français se sentent parfois désavantagés face à la concurrence européenne. Pourtant :
la France offre un cadre clair : on sait où l’on peut voler, et surtout où l’on ne peut pas.
les autorisations STS-01 et STS-02 permettent de voler en agglomération en toute conformité ;
cette rigueur constitue un gage de sérieux et de fiabilité pour les clients publics et privés.
Vers une harmonisation plus réelle ?
L’EASA travaille actuellement à l’amélioration des U-Space et à la mutualisation des UAS geographical zones à l’échelle européenne. Mais tant que les États conserveront leur compétence en matière de sûreté et de vie privée, il restera des écarts nationaux significatifs — notamment dans les zones urbaines.
Conclusion
La France n’est pas une exception restrictive : elle est simplement plus transparente. Dans la pratique, la majorité des pays européens restreignent fortement les vols en agglomération, que ce soit par des interdictions explicites ou par une cartographie dense de zones contrôlées. Pour les exploitants professionnels, la seule voie réellement stable pour intervenir en milieu urbain reste donc la catégorie spécifique (STS-01/02), accompagnée d’une bonne préparation réglementaire.
Ressources officielles
Droneguide – Skeyes (Belgique)
Dronezoner – Danemark
Austro Control DroneSpace – Autriche
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Bonjour, l'Espagne est affichée sur la carte comme la France mais il est possible d'y voler en catégorie ouverte en agglomération. Il est nécessaire , en catégorie ouverte ou spécifique , de notifier le ministère de l'intérieur du vol 5 jours avant , à l'aide d'un formulaire WEB du site du ministère de l'intérieur ( plutôt pour les espagnols ) ou d'un formulaire papier envoyé par courrier postal pour les européens étrangers. Cdt